Comme toujours, je m'inspire de mes consultations pour vous parler de différents sujets.
A plusieurs reprises, j'ai rencontré des mamans avec un bébé de 3-4 mois, qui finissent par me dire tout leur désarroi d'avoir dû abandonner l'allaitement après quelques heures, quelques jours ou quelques semaines, après des heures et des heures d'inquiétude ("bébé ne prend pas de poids, vous n'avez pas assez de lait, Madame"), de douleur ("on m'avait dit que l'allaitement au début, ça fait mal"), de culpabilité (j'ai eu une césarienne, je ne suis pas capable d'accoucher et je n'ai même pas été capable d'allaiter mon bébé")...
Cela m'attriste, me peine, car la plupart du temps, ces bébés qui n'ont pas réussi à bien téter, au prix de grandes frustrations pour eux aussi, ont des freins restrictifs buccaux.
Beaucoup de mamans sentaient que quelque chose n'allait pas, l'ont signalé à différents professionnels qui, tous ont confirmé que bébé tète bien, qu'il prend bien du poids, qu'un bébé "ça pleure" et souvent terminent par une prescription d'oméprazole pour le reflux.
Et "tout va bien madame!" "vous vous inquiétez pour rien!"
Et pourtant! la production de lait ne progresse pas comme elle devrait, ou elle diminue insidieusement. Les douleurs sont de plus en plus insupportables à cause des crevasses. On a dit à maman de donner des suppléments, mais bébés ne veut pas de biberon. Tout le monde est inquiet.
Mais "tout va bien madame!" "Vous vous inquiétez trop, vous êtes fatiguée, reposez-vous en même temps que bébé" Oui mais.... bébé pleure jour et nuit, les tétées sont de vrais pugilats, et des moments de torture, sans compter l'inquiétude que bébé ne prenne pas de poids.
Bref, on touille dans la même soupe, sans laisser aucune chance de comprendre ce qui se passe vraiment.
Et pendant ce temps-là, bébé se démène pour téter avec une langue qui n'est pas capable de fonctionner comme elle le devrait. Il met beaucoup d'énergie à se nourrir et parfois s'endort d'épuisement alors que son estomac lui dit qu'il a faim. Et comme il n'a pu boire assez, il réclame peu de temps après, et se refrustre de ne pas avoir assez de lait malgré tous ses efforts. Vous devez le porter sans arrêt, impossible de le déposer...
Le fait que l'étanchéité de la bouche ne se fasse pas bien va entraîner différents problèmes: cloques sur les lèvres, air avalé à chaque clic (pour rappel, ce "clic" n'est pas normal, il signe le fait que la langue n'arrive pas à sceller la bouche sur le sein ou la tétine), sein ou tétine lâchés fréquemment, bébé qui s'étrangle, lait qui coule sur le côté de la bouche (montrant bien qu'il n'y a pas d'étanchéité), besoin de rots pendant la tétée, difficulté à digérer ensuite, coliques (les bulles qui ne montent pas descendent...), tensions, bébé qui se rejette en arrière, hoquets fréquents, etc... etc....
Donc, si vous, en tant que parents, sentez que quelque chose ne va pas, continuez de chercher un professionnel qui va vous écouter! Bien sûr, il ne fera pas de miracle, mais, le fait de savoir ce qui se passe et le pourquoi de tout ça, permet de prendre des mesures tant pour maintenir l'allaitement et la production lactée que pour trouver comment aider bébé à être mieux dans son corps.
C'est pour ces raisons que les bébés qui ont des freins restrictifs buccaux ont besoin d'être suivis par plusieurs professionnels.
N'oublions pas que ces freins sont là depuis le 1er trimestre de la grossesse et que, déjà, ils ont pu entraver certains mouvements de bébé, déjà depuis ce moment-là. Cela peut entraîner une difficulté dans la mise en place des réflexes archaïques , une difficulté à se positionner correctement pour la naissance. Déjà depuis ce moment, la langue devrait appuyer sur tout le palais pour lui permettre de bien s'étaler et de donner de la place aux futures dents et préparer une respiration nasale, bouche fermée. Le bébé avale du liquide amniotique et sa langue ne fonctionne pas normalement, donc a du mal à s'entraîner pour téter.... De plus, la langue, en appuyant sur le palais permet de stimuler le nerf vague et le système parasympathique du bébé (celui qui lui permet de s'apaiser).
Des tensions peuvent s'installer parce que les freins sont des fascias et que tous les fascias sont reliés dans le corps. Ces tensions vont entraîner une irritation de certains nerfs qui passent dans la zone de la nuque qui est très souvent impactée par ces tensions (raison pour laquelle ces bébés sont souvent en hyperextension et ont des troubles de la digestion).
Donc, à la naissance, ces freins sont déjà là et les pédiatres devraient les détecter correctement dès le premier examen du nouveau-né. Mon optimisme me fait croire qu'un jour nous y arriverons, mais cela va encore prendre quelques années pour que les informations qui existent aujourd'hui (plus de 500 études, notamment) servent d'appui au diagnostic des freins restrictifs et à la prévention de tous les troubles qui y sont associés.
Je vous invite donc à lire les articles de Caroline de Ville sur son site Au sein en douceur , à voir ses nombreuses vidéos sur sa chaîne youtube . Si le sujet vous intéresse, il y aussi le livre "Frein de langue" du Dr Richard Baxter et surtout, surtout, à ne pas lâcher si vous êtes en difficulté.
L'annuaire des professionnels de l'Institut Au sein en douceur vous permet de trouver des professionnels certifiés. Je conviens qu'il n'y en a pas encore beaucoup, mais en vous adressant à eux, vous trouverez peut-être des professionnels dont la formation est en cours qui sont donc sensibilisés à la question, peuvent déjà vous accompagner et vous ouvrir leur carnet d'adresses autant que possible.
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